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journal d'un curé de campagne à la campagne
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10 février 2015

Viaggio a Roma

Dans le cadre de l'IHEMR, j'ai la chance de participer à un voyage d'étude dans la Ville éternelle ! Trois jours intensifs, menés tambour battant par ce jeune institut qui souflle sa deuxième bougie seulement : bâti sur le le modèle de l'IHEDN -mieux connu-, cet Institut donne une formation sur le fait religieux, autrement dit sur les religions vues d'assez loin, mais avec la participation de certains qui la vivent ... d'assez près ! Notre groupe compte en effet un Imam, un rabbin, une femme pasteur (calviniste) et un prêtre catholique, voire catho' ...

Rome, donc, mais sans le pélerinage ... impression étrange au début, mais que l'on comprend bien, étant donné le caractère hétéroclite (tiens, au fait, on n'a toujours pas essayé d'inventer le mot "homoclite", le lobby triste doit être en perte de vitesse ...) du groupe : précisons, d'ailleurs, que les athées sont aussi bien présents (au moins deux ou trois sur trente), c'est une donnée en fait non-négligeable.

C'est drôle : nos discussions portent toutes ou presque sur le dialogue entre les religions, mais très vite émerge la question du dialogue entre ceux qui n'ont pas de religion et ceux qui en ont une, et les contours de cet échange ressemblent fort aux questions interreligieuses.

Chaque jour est littéralement "bourré" de rencontres, un peu en dépit du bon sens, mais c'est le défaut de tous les organisateurs de voyage, ils ont peur du vide : dommage, car c'est dans les "vides" que se passe l'essentiel, à savoir de belles -ou oiseuses, on ne peut pas toujours avoir de la chance- discussions sur la religion. J'ai eu droit, bien sûr, à la question de la communion aux divorcés-remariés, etc etc ...

Nous avons ainsi rencontré le Cardinal Tauran, pour les relations avec l'Islam, qui s'est montré assez cru dans sa description des impasses sur le dialogue avec les sunnites, au grand dam du religieusement correct (réactions assez vives dans le groupe), qui aurait préféré le refrain habituel sur l'Islam modéré et son pendant "radical", pour ne pas bousculer le credo du mainstream.

Excellente intervention d'Aude Dugast (comment se passe un procès de canonisation, en l'occurrence celui du Professeur Lejeune), qui avec finesse a "posé" la sainteté reconnue par tous et non seulement par l'Eglise, jusqu'à un développement courageux sur la question de l'avortement, au moment où cela était opportun.

Plus consensuelle fut la rencontre avec l'ambassadeur de France près le Saint-Siège, dont l'accueil fut parfait, vraiment, à une exception près, lorsqu'il se crut inspiré de nous raconter qu'un grand spécialiste de la Bible lui avait prouvé par A + B que Moïse n'avait jamais existé ! Ce qui est probable, si vous m'en croyez, c'est qu'on parlera encore de Moïse pendant pas mal de temps, tandis que le nom de ce spécialiste aura disparu avant même d'avoir été connu ... je me souviens de déclarations péremptoires analogues sur la date de rédaction des évangiles (qui "ne pouvaient pas avoir été rédigés avant 80 ou 90 après JC"), démenties un beau jour par un tout petit bout de papyrus qui datait Saint Marc de 46, et qui se gaussait silencieusement des certitudes "scientifiques" déclamées pompeusement 15 ans plus tôt ; comment ne pas penser aussi à la bourde du carbone 14 sur le linceul de Turin, et la jubilation stupide de ceux qui étaient si sûrs d'avoir le dernier mot sur la relique. Mais ne soyons pas injustes, Monsieur l'Ambassadeur nous a servi -outre de très bon petits fours- un discours cohérent et nourrissant sur les relations entre un état et le saint-Siège.

Nous avons rencontré également le recteur du PISAI, qui forme des islamologues (surtout chrétiens), assez intéressant et surtout très habile, dont je regrette qu'il insiste tant sur le "on ne veut convertir personne", d'autant plus que le schéma qu'il nous a servi était assez simpliste : d'un côté les gens ouverts, empathiques face à l'Islam "qui ne veulent surtout pas convertir", et de l'autre des étudiants malhonnêtes qui voulaient se servir de leur connaissance de l'arabe et du Coran pour lutter contre l'Islam, alors qu'il me semble qu'un troisième terme est envisageable et plus évangélique, à savoir le désir de faire connaître Jésus-Christ aux musulmans, pour qu'ils puissent d'eux-mêmes librement s'y convertir ... Il est bien entendu que l'on doit s'arrêter à la porte des consciences, mais aussi qu'on doit témoigner et provoquer même, le désir de la recherche de la vérité.

Une présentation très brillante de la communauté de Sant'Egidio, un passage rapide chez les chevaliers de Malte, un dîner avec des journalistes français travaillant à Rome, un shabbat à la grande synagogue de Rome, une visite des fouilles de Saint-Pierre, une rencontre avec la secrétairie d'Etat du Saint-Siège complètent le tableau déjà bien fourni, tout ça en moins de trois jours !

Heureusement, j'avais pris la précaution de venir trois jours plus tôt, logé chez mes amis Tinguy, afin d'ajouter un pèlerinage reposant à ce voyage un tantinet paien ...

Je termine en mentionnant un fait cocasse : jeudi, tandis que je m'apprêtais à célébrer sur le tombeau de Saint-Pierre avec un groupe, je me présente un peu mécaniquement à chaque personne : "bonjour Monsieur, .. Emmanuel d'Andigné" ... et l'un d'eux me répond "bonjour Mon Père, Geoffroy d'Andigné" ... Une messe, un café et deux croissants plus tard, nous avions fait avec mon cousin plus ample connaissance ! Le monde s'est encore rétrécit

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